Intellectuelle brillante, écrivain, traductrice, chercheur, responsable du département sciences humaines du CNRS après la seconde guerre mondiale, Eva de Vitray Meyerovitch est entrée en islam vers 1950. Une quarantaine d’ouvrages témoignent de sa recherche ardente, parmi lesquels un trésor enfin révélé aux francophones : le « Mathnawi » de Rûmî. Sa parfaite connaissance de la pensée de Mohammad Iqbal lui a permis de trouver sa voie dans un islam ouvert, de paix et d’amour, dont elle est devenue l’une des meilleures ambassadrices.
« Lorsque j’ai fait mes premiers pas vers l’islam, après la lecture du livre d’Iqbal, vous pensez bien que cela n’a pas été facile. J’avais été élevée dans la religion catholique par une grand-mère d’origine anglicane. J’avais un mari juif. J’avais le sentiment de faire quelque chose de fou et j’étais parfois d’autant plus désemparée que je n’avais personne pour me guider… » Dans son livre intitulé « Islam , l’autre visage », Eva de Vitray Meyerovitch confie à Rachel et Jean-Pierre Cartier qui l’interrogent, l’influence qu’a exercé sur elle sa grand-mère anglicane, convertie par amour du catholicisme. Sa grand-mère, leur dit-elle, « était d’une honnêteté foncière…L’idée était de ne jamais tricher ».
Elevée dans une institution de sœurs, elle ressent très vite le poids des mensonges ou des raccourcis trompeurs. Plus tard, devenue docteur en philosophie, proche de Louis Massignon, son inlassable quête de vérité lui fait rencontrer et traduire la pensée de Mohammed Iqbal, philosophe indien intéressé par la rencontre orient-occident.
Ce sont des influences qui comptent, elle fait le choix d’entrer en islam en 1950. Elle explique pourquoi : « L'islam oblige à reconnaître toutes les communautés spirituelles, tous les prophètes antérieurs. L'islam est le dénominateur commun à toutes les religions. On ne se convertit pas à l'islam. On embrasse une religion qui contient toutes les autres ».
Sans doute était-il plus facile de vivre cette expérience peu commune alors, au sein du cénacle des chercheurs. Elle s’entoure de quêteurs de vérité, comme elle, Amadou Hampâte Bâ, Najm Oddine Bammate… Ses missions au Caire, où elle a enseigné à Al Azhar, au Maroc, en Turquie, au Koweit… sont autant de riches expériences du monde arabo-musulman.
Largeur de vue, courage, simplicité, goût du travail bien fait, intelligence généreuse… lui ont permis de dépasser les préjugés et d’ouvrir bien des portes. Elle est bien sûr imprégnée de l’enseignement de Rûmî dont elle entreprend la traduction dans les années soixante dix avec Djamchid Mortazavi. « Une somme spirituelle, une comédie humaine et divine,l’apogée de la mystique musulmane, » écrit-elle dans son introduction. En 1990, après quinze années de travail, le public francophone a pu en fin avoir accès à cette œuvre majeure de l’islam, le « Mathnawi », exégèse du Coran, authentique enseignement composé de 50 000 vers, invite à la fois ludique et savante à la perplexité, la réflexion, la remise en cause de ses comportements. Œuvre presque indispensable aux « cheminants ».
Décédée en 1999, Eva de Vitray Meyerovitch laisse derrière elle une trace lumineuse de compréhension de l’Orient musulman et une voie d’accès au bel islam. Son œuvre permet aujourd’hui à de nombreux Occidentaux d’en comprendre la portée et l’importance pour l’humanité, bien au-delà des discours stéréotypés des média.
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